Achille Mbembe : « Les Civic Tech peuvent redonner confiance dans l’action publique »
À l’occasion du lancement du parcours « Connexions citoyennes », porté par le Campus du groupe AFD et la Fondation de l’innovation pour la Démocratie, Achille Mbembe, son directeur général, revient sur les enjeux des Civic Tech pour la vitalité démocratique en Afrique francophone et sur les raisons de l’implication de la Fondation dans ce parcours de formation et d’incubation dédié à l’innovation citoyenne.
Pourquoi les Civic Tech sont-elles aujourd’hui un enjeu majeur pour les sociétés africaines ?
Achille Mbembe : Le numérique bouleverse en profondeur non seulement les modalités par lesquelles les citoyennes et les citoyens s’informent, débattent et revendiquent leur place dans la sphère publique, mais aussi la structure même de cette sphère. En Afrique, ce potentiel est immense. Les Civic Tech, en tant qu’outils d’émancipation, peuvent élargir l’accès à l’information, renforcer la transparence, encourager la participation citoyenne et ouvrir de nouveaux espaces de parole, en particulier pour les jeunesses africaines.
Les formes de domination ont souvent reposé sur le contrôle de la parole, de l’information et de la mémoire. Aujourd’hui, le numérique redonne à chacun la capacité de produire du sens, de témoigner, de questionner le réel. Il prolonge les grandes luttes d’autodétermination du continent, mais dans une ère où l’infrastructure technologique devient elle-même un champ de pouvoir.
Les Civic Tech interrogent notre conception de la démocratie. Elles ouvrent la voie à des formes d’engagement plus horizontales, plus inclusives, libérées des hiérarchies héritées, plus proches des vécus locaux. Elles participent à la construction d’une démocratie vivante, ancrée dans l’expérience, attentive aux singularités. En cela, elles constituent un levier essentiel pour réinventer la confiance, non pas comme un simple contrat social, mais comme un lien éthique entre les institutions et les vies qu’elles sont censées servir.
C’est cette énergie démocratique, profondément ancrée dans les imaginaires, les luttes et les aspirations africaines, que nous voulons contribuer à nourrir et à faire grandir.
Qu’apporte le parcours « Connexions citoyennes » à celles et ceux qui souhaitent s’engager dans l’innovation démocratique ?
Achille Mbembe : Ce parcours a une force rare : il combine, dans une même dynamique, formation, accompagnement, expérimentation et mise en réseau. Il s’adresse à celles et ceux qui veulent passer de l’idée à l’action, qu’il s’agisse d’activistes, de membres d’OSC, de journalistes, de développeurs, de créateurs de contenus ou d’entrepreneurs sociaux.
Son objectif est clair : renforcer les compétences citoyennes et numériques pour permettre à chaque participant de concevoir, structurer et porter un projet civic tech crédible et utile à sa communauté.
Le parcours aide ainsi à comprendre les fondements, les enjeux et les usages des Civic Tech ; à transformer une idée citoyenne en projet structuré et cohérent ; à apprendre à travailler en équipe, mobiliser des partenaires et penser la viabilité du projet ; et à maîtriser les indicateurs, analyser les risques et réfléchir à l’impact démocratique.
Et surtout, c’est un parcours entièrement gratuit, accessible à toutes et tous sous réserve de motivation et d’engagement. Pour beaucoup, c’est une chance unique d’accéder à des ressources, des outils, des expertises et un réseau souvent difficiles à atteindre.
Pourquoi la Fondation de l’innovation pour la Démocratie a-t-elle choisi de soutenir et co-construire ce parcours avec l’AFD ?
Achille Mbembe : Parce que nous partageons une conviction commune : la démocratie a besoin d’être réinventée par celles et ceux qui la vivent au quotidien, en particulier les jeunes.
L’AFD, via son Campus, apporte une expertise solide en matière de formation et de mobilisation d’acteurs du changement. La Fondation, elle, s’engage depuis sa création à soutenir les innovations citoyennes, les pratiques participatives et les approches qui renouvellent la vie publique sur le continent.
Ensemble, nous avons voulu proposer un parcours plus contextualisé, actualisé et ambitieux, capable d’aider des projets à franchir un cap.
S’associer à « Connexions citoyennes », c’est soutenir une génération d’acteurs engagés qui inventent de nouvelles manières de rendre l’action publique plus transparente, plus ouverte et plus inclusive.
Un dernier mot pour celles et ceux qui envisagent de postuler ?
Achille Mbembe : Je leur dirais de ne pas hésiter. Que l’on ait déjà un projet ou seulement une intuition, le parcours offre un espace bienveillant, exigeant et stimulant pour apprendre, tester, progresser. Et tout cela sans aucun coût, ce qui ouvre la porte à des profils très divers.
Si vous pensez que le numérique peut renforcer votre pouvoir d’agir, si vous souhaitez contribuer à une démocratie plus ouverte, ou si vous cherchez simplement à structurer une action citoyenne plus efficace, alors ce programme est fait pour vous.
Votre énergie, vos idées et votre engagement peuvent réellement changer les choses.
Crédit photo : Par Heike Huslage-Koch — CC BY-SA 4.0
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