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« Voix autochtones » : un podcast pour inspirer d’autres formes de relation au vivant et aux autres

Publié le 30 octobre 2025

Comment repenser notre relation au vivant ? Comment voir et sentir le monde autrement ? Le Campus groupe AFD s’est associé à Sabah Rahmani, journaliste, anthropologue et éditrice, qui travaille aux côtés de peuples autochtones depuis près de trente ans, pour explorer comment leurs récits peuvent inspirer des modes de vie et d’action plus équilibrés. 

C’est dans ce cadre qu’a été imaginé le podcast « Voix autochtones » ; à partir de récits autochtones, cette série propose de s’immerger dans des univers sonores, guidés par des sages de diverses cultures, où paroles, cosmovisions, rituels et chants traditionnels offrent des représentations sensibles du vivant. Des visions et pratiques qui s’inscrivent au cœur de modes de vies ancestraux de peuples racines toujours en quête d’harmonie avec l’environnement.

Pour le lancement du podcast, Sabah Rahmani répond à trois questions :

Pourquoi est-ce important selon vous de donner la voix aux peuples racines ? 

Sabah Rahmani : Les peuples racines ont des choses à nous apprendre dans leur rapport à la nature et notamment à la préservation du vivant : l’ONU reconnaît que les peuples autochtones préservent 80 % de la biodiversité de la planète sur leurs territoires ancestraux alors qu’ils ne sont que 5 à 6 % de la population mondiale. Dans le contexte actuel des crises climatique et écologique que nous rencontrons, il apparaît donc important d’écouter leurs voix. 

Ce sont aussi des peuples qui, avec l’histoire coloniale mondiale, ont été et sont encore parfois trop souvent discriminés, malmenés, ostracisés. Il est important de revaloriser leurs sagesses et leurs cultures, parfois millénaires. De recréer également un dialogue interculturel avec ces sociétés parce qu’elles sont porteuses de cosmovisions, de rapports au monde, qui peuvent nous inspirer et nous inviter à revisiter notre relation au vivant que notre système mondialisé et matérialiste est en train de détruire.


D’après vous, qu’est-ce que nos sociétés ont à apprendre de ces peuples autochtones ?

Sabah Rahmani : Pour les peuples autochtones, il n’y a pas de séparation entre l’humain et la nature : l’être humain fait partie de la nature et du vivant, de façon totale et intégrante.

Pour eux, la nature n’est pas un objet de consommation, inerte et mécanique mais c’est un ensemble d’êtres vivants (que ce soit le minéral, l’animal, le végétal, l’astral). En recréant un pont et un dialogue avec ces sociétés-là, porteuses de sagesse avec le vivant, l’idée est de se demander comment, en Europe, on peut renouer un rapport plus respectueux et plus réciproque avec la nature. 

Souvent animistes, ces peuples considèrent l’autre, quelle que soit sa forme de vie, comme un sujet, un être doué d’une essence avec lequel il est possible de communiquer. Cette communication peut passer par des rituels ou des offrandes. Par exemple, quand ils vont pêcher, ils demandent toujours l’autorisation aux esprits des lieux pour pouvoir prélever la nourriture dont ils ont besoin. Ils ont cette conscience d’échange : ce qu’ils prélèvent dans la nature ils le redonnent sous forme de gratitude et d’offrande.

Cette attitude permet deux choses : prendre d’abord conscience de la finitude des ressources et du fait qu’on peut prélever que ce dont on a besoin, sans être dans une attitude de surconsommation et elle permet une réciprocité, une gratitude de ce que la nature a offert.

Sans adopter les mêmes croyances, nos sociétés pourraient donc apprendre de cette attitude de respect, de réciprocité et de cette quête d’harmonie à préserver. Elles pourraient développer cette conscience que, lorsqu’on prélève quelque chose dans la nature, ce ne sont pas des ressources infinies ni des objets.Enfin, il peut arriver, quand on cherche à comprendre les cosmovisions des peuples autochtones, de verser malheureusement dans un registre « d’exotisation » ou « d’idéalisation » des pratiques ancestrales, voire d’appropriation culturelle.

Quelles pistes pour éviter cela ?  

Sabah Rahmani : En effet, le but n’est pas d’idéaliser ni d’imiter les peuples autochtones car chaque société et chaque peuple a sa propre culture et sa propre histoire.

Une première piste est de considérer le dialogue et le respect réciproque qu’il implique. L’altérité nous tend toujours un miroir de qui nous sommes, elle nous renvoie quelque chose à nous-même, à notre culture, nos racines ou notre comportement vis-à-vis du vivant. 

Une autre piste pour éviter l’appropriation est de toucher à l’universel. Tout être humain a une sensibilité d’être au monde qui passe par son corps, ses sens, son être. Au-delà des différences culturelles et rituelles, nous avons tous accès au même rapport sensible au monde : quand je me promène dans une forêt, quand je nage dans la mer ou quand je marche en montagne. Nous avons tous déjà vécu ces moments de beauté et d’admiration envers un environnement où l’on s’est senti bien, heureux, léger et en harmonie avec le vivant. Ce sentiment océanique est universel et ne peut pas être objet d’appropriation. Ce qui change, c’est la forme : le rituel et la culture. Le rituel n’est pas qu’une simple question de croyance. C’est un langage qui permet de sortir de l’ordre de l’intellect et de la théorie : il va poser en acte un geste de gratitude. Le rituel symbolise. C’est d’ailleurs pourquoi la série de podcasts prend le parti de s’immerger de manière sensible dans un environnement et met l’accent sur des rituels portés par des sages autochtones. 

Pour s’inspirer sans s’approprier, il faut donc essayer de voir quelle conscience ou quel sentiment universel les voix des peuples racines réveillent en nous. Chacun peut ensuite, comme il le souhaite, inventer son propre rituel de remerciement pour mettre en acte cette gratitude.

Le podcast est accessible ici ainsi que sur Spotify, Deezer, Itunes et Acast.

Cette série est développée dans le cadre de l’Ecole des récits et des imaginaires, une offre de formation proposée par le Campus groupe AFD, dont l’objectif est de mettre en lumière les récits et imaginaires dans lesquels nous vivons, d’inspirer, de permettre l’émergence de nouveaux imaginaires et d’accompagner le passage à l’action afin d’ancrer ces nouveaux récits dans le réel. 


Allez plus loin en lisant Paroles de peuples racines. Plaidoyer pour la Terre, de Sabah Rahmani, préface de Pierre Rabhi, Actes Sud, 2019 et en poche Babel, 2025..

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